Douze kilomètres avant
notre arrivée à l’endroit le plus éloigné sur l’Amazone pour nous, soit
« Manaus » (1500 km de la mer), les flots noirs et acides du « Rio
Negro » rejoignent ceux d’un jaune argileux de la « Solimões pour
former l’Amazone. Nous ne pouvons pas
aller plus loin sans changer de navire car le « Maasdam » possède un
tirant d’eau trop important pour s’aventurer sur le reste de ce géant. Nous n’aurons fait que le quart de la
distance totale de l’Amazone mais, on aura quand même une bonne idée de la vie
sur cette partie du monde. Manaus, avec
ses quelques 200 000 habitants et ses activités commerciales bien
développées est l’une des villes les plus importantes de l’Amazone. Son quai flottant lui permet de poursuivre
ses activités commerciales même pendant la crue des eaux lors de la saison des
pluies. À cette période, soit de février à mars, le fleuve
se gonflera jusqu’à sept mètres (10
mètres à certaines années) apportant alluvions et débris de toutes sortes..
Nous resterons à Manaus
pendant deux jours afin de nous permettre d’approfondir nos visites car, le
dimanche au Brésil, y a pas grand-chose d’ouvert. Tous les magasins, les musées et autres
bâtiments historiques sont fermés ne nous laissant les contempler que de l’extérieur
en perdant toujours l’essentiel qui se trouve à l’intérieur, comme autre chose
d’ailleurs. Par contre, lorsque les
grands magasins sont fermés, ils permettent aux commerces de rue d’occuper
toute la place même celle des voitures qui pour la circonstance font le
détour. Toute la rue est laissée aux
mains de ces petits cubicules rouges de deux mètres d’arête dans lesquels
s’entasse marchandise de toute sorte ne laissant que très peu d’espace pour
leur propriétaire. On peut y voir du
beau et du laid, du pratique et de l’inutile, quelques tables avec leurs
chaises, en plastique, sur lesquelles des Brésiliens savourent une cuisine
familiale, un cordonnier réparant dans la rue une sandale trop usée pour être
jetée et tout ça entremêlé de passants furetant d’un kiosque à l’autre,
hésitant, négociant pendant que d’autres ne font que passer. C’est aussi l’occasion d’y voir une
cathédrale remplie de fidèles rappelant un souvenir d’un temps déjà rendu trop
loin pour nous.
Lundi, nous retournons
en ville pour y retrouver une ville différemment animée. Les cubicules de service sont en dormance
dans une rue transversale permettant aux pétrolières d’écouler leur
« stock ». Nous, on en profite
pour nous isoler et visiter un interdit de la veille et faire quelques courses. Le théâtre de Manaus, construit à la fin du XIXe
siècle, rappelle une période faste d’un temps passé. Un théâtre en forme de fer à cheval doté de
quatre étages de loges devenant de plus en plus inutiles au fur à mesure que
l’on s’élève ne permettant pas à ses occupants de voir correctement le
spectacle. Ils pourront contempler les
décorations murales et la peinture du plafond qui représente la tour Eiffel vue
d’en bas en écoutant une musique de Mozart ou sous la célèbre tirade de Cyrano. Aussi surprenant que cela puisse paraître ce
lieu de culture était, pour ma part, plus intéressant par son architecture
extérieure. À la sortie de notre visite
une autre surprise nous attend : la pluie.
Il pleut à boire debout, comme on dit, et nous comprenons la signification
des termes, saison des pluies et crue de l’Amazone. Nous enfilons des « ponchos de
pluie » transparents, ne nous laissant point distraire de notre horaire
prédéfini et nous partons à la recherche de cartes postales pour quelques
privilégiés. La première étape franchie,
nous partons à la découverte du « corrieos » pour les timbres
postaux. Après plusieurs détours,
contours et retours, sous une pluie de plus en plus présente, nous nous
retrouvons face à la postière. On étale
nos cartes, prononçons avec un accent anglais : « France and Canada »,
espérant un signe de compréhension de notre vis-à-vis. Pas un mot, pas un son, pas un regard et
tout-à-coup des doigts s’agitent sur un clavier et d’un geste presque
nonchalant un écran se tourne pour nous indiquer un « 5,15 ». On comprend que c’est le coût de notre envoie
et nous acquiesçons du bonnet : marché conclu. Un tiroir s’ouvre et des feuilles de timbres
de différentes grandeurs s’étalent devant la préposée qui recherche la
combinaison appropriée à nos envois. Le
choix établi, elle découpe, détache et distribue en deux groupes les
affranchissements, sort un pot de colle et en applique sur l’un des timbres
pour enfin l’apposer sur l’une des cartes en prenant soin d’en ajouter
quelques-uns préencollés. L’opération se
répètera une deuxième fois. Encore
heureux que notre envoi n’était pas pour une région plus éloignée, nous
n’aurions pas eu suffisamment de place pour y inscrire l’adresse. La mission terminée, nous retournons à notre
point de départ sous le regard amusé de Brésiliens photographiant deux
touristes défiant la pluie avec le sourire….
Le système routier sur
l’Amazone est déficient et les déplacements se font surtout par bateaux. Le « bateau à trois étages » est le
plus fréquemment utilisé. Trois étages
pour permettre la distribution de hamacs lorsque c’est nécessaire comme pour le
parcours entre « Parintins » et Manaus » distant l’un de l’autre
de 565 km. Ce petit bateau fera la
distance en 15 heures avec le courant mais, en 27 heures contre le
courant. La nuit venue les passagers
s’étalent sur tous les ponts pour rencontrer Morphée. Pour notre part nous retrouvons nos quartiers
en attendant une autre belle journée ensoleillée.
Bonne
Fête à Nathalie…
La dernière place que
nous avons visitée dans l’Amazone est « Alter do Chão » qui est un
endroit de villégiature pour les gens de « Santarém ». En réalité ce n’est pas le grand fleuve mais
plutôt un de ses quinze mille cours d’eau qui alimentent l’Amazone. Contrairement à ce dernier, la « Rio Tapajós »
n’a pas tous ces sédiments qui rendent l’Amazone si opaque. Cette rivière aux eaux plus claires possède
aussi des plages sablonneuses agréables et invitantes qui font que cet endroit
est privilégié par les plaisanciers de « Santarém » qui y
construisent de somptueuses maisons secondaires. C’est, malheureusement, le seul intérêt de
cet endroit et comme nous y étions un jour de semaine, l’animation y était
presqu’inexistante.
Voici quelques données
intéressantes à savoir sur ce mystérieux fleuve :
ü
Une
longueur de 6750 km à partir de la rivière Ucayali au Pérou
ü 15 000 tributaires et
sous-tributaires connus
ü La superficie de la forêt tropicale
Amazonienne est de 7 049 947 kilomètres-carrés soit 40% de la
superficie du Brésil
ü Un débit de 174 128 litres d’eau à
la seconde (6 000% plus que le Nil)
ü
Température
moyenne de l’eau : 26o C
Dix-sept heures trente
jeudi 28 février 2013, nous sortons de ce grandiose fleuve qu’est
l’Amazone. Nous venons de parcourir, aller-retour,
près de trois mille kilomètres à l’intérieur d’une parcelle du monde qu’on
n’aurait jamais cru pouvoir faire. Nous
devons vous dire que nous aurions aimé être les premiers à franchir certaines
limites et voir la nature telle qu’elle était avant les ravages d’une
civilisation moderne mais, nous aurions dû naître au XVe siècle et
nous n’aurions pas eu, par contre, la joie de vous connaître. Comme la nature fait bien les choses! Le retour sur l’Atlantique redonne le droit à
une utilisation moins restreinte de l’eau et par conséquent, les salles de
lavage vont redevenir opérationnelles. J’ai
comme l’impression que demain mon horaire sera modulé par les disponibilités
qui me seront offertes pour me transformer en lavandière du moment….
Malheureusement, aucun
génie bienfaisant ou fée généreuse n’est venu pendant la nuit réaliser un souhait
silencieusement émis m’obligeant à me précipiter dès les premières heures vers
une tache (oups! vers une tâche) inévitable.
Aussitôt dit, aussitôt fait et nous voilà prêts pour affronter, avec
fierté et au grand jour le reste du
voyage. Cet après-midi nous prévoyons
aller au « five o’clock tea » qui, curieusement a lieu à quinze
heures tous les jours. On y sert une
panoplie de thés ou tisanes, toujours accompagnés de petites pâtisseries toutes
plus alléchantes les unes que les autres et de ce qui est encore meilleur, à
mon avis, de petits « scones » sur lesquels on y dépose une couche de
crème chantilly recouverte de confiture d’abricot. Hum! Un vrai délice à s’en lécher les babines.
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