dimanche 14 février 2016

À nous le continent….


Il est dix-huit heures et nous avons une impression de déjà-vu lorsque nous regardons le décor par la fenêtre de la salle à manger.  Nous sommes bel et bien revenus à notre point de départ afin d’y laisser madame ou monsieur X avant d’entreprendre la grande traversée.  Le navire fait un demi-tour sur lui-même et nous voilà repartis pour le continent blanc.  Le capitaine nous apprend qu’il ne peut plus attendre car, le retour sur nos pas a augmenté considérablement le retard escompté.  Il s’engage donc en direction du « passage de Drake », passage obligé avant « l’archipel Palmer », notre destination, où se situe la majorité des stations de recherches des différents pays.  Il nous annonce, par la même occasion, que nous pénétrerons dans la zone de turbulence vers minuit et que le temps ne s’améliorera pas avant les treize à quatorze heures, le lendemain.  Il nous demande de ne pas laisser d’objets libres sur les balcons car, la vélocité des vents pourrait les projeter hors du navire.  Il nous demande aussi de bien stabiliser les choses dans notre cabine et de faire attention lors de nos déplacements, car un « vieux » ça se déplace toujours la nuit…(quelques fois plus rapidement qu’il l’aurait souhaiter).

Nous nous couchons de bonne heure, espérant ainsi ne pas avoir connaissance du mouvement exagéré de notre « Zaandam ».  Le tout fonctionne comme nous l’avions pensé jusqu’au moment où, par inadvertance, à quatre heures du matin, j’allume la lampe de chevet (l’interrupteur étant au-dessus de ma tête) et me réveille en me demandant ce qui se passe.  Je ferme la lampe mais, merde je suis réveillé et je me rends compte que le capitaine ne comptait pas de blague.  Ça brasse en titi!  Ça brasse assez qu’il y a même des personnes, au sixième étage qui ont roulées hors de leur lit, en tout cas c’est ce qui nous a été raconté de la bouche même de l’affligé.  Des vents de 80 km/h remplissant les promesses sur la hauteur des vagues et définissant l’amplitude des pas lors de nos déplacements.  C’est au moment de vous déplacer vers la salle de toilette que vous vous rendez compte que vous pouvez l’atteindre dans un temps record.  C’est à cet instant précis que je me suis mis à penser à tous ces explorateurs qui ont fait le même parcours, mais en voilier.  Non je ne veux plus penser à ça, je retourne dans mon lit et je dors ou j’essaie.  Nous aurions bien aimé vous faire partager davantage ce mouvement aqueux par une photo ou vidéo explicite mais, impossible de sortir à l’extérieur le capitaine en interdit l’accès.

Comme nous avait prédit le capitaine, le temps s’est calmé quelque peu, ce qui a permis à la majorité de reprendre leur esprit.  Nous avancions à une vitesse de douze nœuds marins afin de ne pas causer trop de stress à la structure du navire.  Maintenant que la vitesse des vents a considérablement diminué, le capitaine pousse les machines pour atteindre une vitesse de croisière d’un peu plus de 19 nœuds marins (environ 34 km/h).  À cette vitesse nous devrions atteindre le 65ième parallèle sud, « l’Archipel de Palmer », avant quinze heures demain.  Malgré toutes ces améliorations, le navire se garde encore quelques mouvements ayant des effets sur notre équilibre.  Nous commençons à faire du mimétisme par notre démarche de pingouins dans les différents corridors.  C’est quand même mieux que ce matin et je dois vous dire que lorsque vous êtes dans votre lit, vous vous sentez comme dans un ber et vous vous laissez bercer.  La nuit s’est très bien passée et la surprise de ce matin a été de constater le contraste d’avec la veille.  Une température extérieure de moins trois et de la neige sur le balcon promenade.

Après une bonne nuit de repos et un bon petit déjeuner, nous nous habillons correctement, une tuque callée jusqu’aux oreilles et caméra aves les objectifs nécessaires.  Nous ne savons où donner de la tête ou de la caméra mais, tout nous semble essentiel à immortaliser.  Un paysage sauvage pas encore touché par  quelconque compagnie avide de faire que des profits pour le bien de l’humanité et de son portefeuille.  Même si le temps est un peu couvert et que le soleil est absent pour le moment, il n’en reste pas moins que c’est un spectacle féérique.  Nous aurons les trois prochaines journées pour nous reprendre côté photos.  Le taux d’humidité atteint les quatre-vingt-dix-huit pourcents ce qui fait que le petit -3o C nous traverse de part en part.  Ajoutez à ça, l’inévitable facteur vent qui est omniprésent et je peux vous affirmer que les températures du Québec sont plus clémentes (en tout cas il nous semble).  Je dois ajouter que l’environnement qui nous a été offert, a largement compensé cet inconvénient.



 La deuxième journée près du 65ième parallèle restera à jamais gravée dans nos mémoires.  Un ciel radieux avec un soleil qui met en valeur les moindres reliefs géologiques autour de nous.  Un blanc immaculée presqu’aveuglant, des teintes bleutées sortant des abîmes et une eau calme nous offrant le paysage en double.  Nous sommes comblés et émus de ce qui se déploie devant nous.  Lentement le navire se faufile à travers ces icebergs (masses de glace formée d’eau douce qui se détachent des glaciers), ralentit pour prendre une courbe et s’arrête pour nous laisser admirer des colonies de manchots, qui se servent de leurs ailes pour nager, (car il n’y a pas de pingouins ici qui sont d’origine nordique et se servent de leurs ailes pour voler).  Il y a aussi de phoques qui se prélassent sur de mini icebergs.  Ce milieu est protégé par une entente sur l’environnement et le capitaine tient à respecter cette entente.   Il a donc demandé à tous les passagers de ne pas manger ni boire à l’extérieur, de s’abstenir de fumer afin d’éviter tout déchet potentiel pouvant se retrouver dans la mer.  Il a aussi demandé de ne pas chanter, faire de bruit ou de la musique afin de respecter la vie environnementale.  Le silence et le chant de la nature sont rois.  Demain nous nous dirigerons plus vers « l’Ile de la Déception » qui se retrouve plus au nord.  Nous quittons lentement le 65ième parallèle pour revenir vers un autre monde.  L’Antarctique : un bout du monde exceptionnel à voir….

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